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Micropolluants et qualité de l’eau : un défi pour demain

Au Danemark, Veolia porte depuis plusieurs années un grand effort d’innovation afin de développer une solution de traitement de la « micropollution » que constitue la présence de résidus médicamenteux dans les eaux municipales. Cette initiative reflète la préoccupation grandissante de nos sociétés face aux micropolluants, et les solutions nouvelles qui pourraient, demain, s’avérer essentielles.  

Au-delà des risques liés à la dégradation de l’environnement, la pollution de l'eau est aussi une, si ce n’est « la » priorité sanitaire du siècle : en 2017, une des plus importantes études scientifiques de ces dernières années sur le sujet concluait que plus d’un décès humain sur six provenait de maladies causées par la pollution – à 90 % dans des pays à faibles revenus. Parmi les difficultés rencontrées pour favoriser le traitement des pollutions, se trouve le manque d’information, à la fois sur les substances polluantes et sur leurs effets toxiques – notamment conjugués, ce que l’on appelle l’effet cocktail. En un mot : le risque de maladies liées à la pollution et surtout à la micropollution, est très difficilement quantifiable.  

Les micropolluants et l’eau : la difficile maîtrise du phénomène 

Le problème est d’ailleurs brûlant sur le sujet des perturbateurs endocriniens, ces composés qui perturbent le système hormonal humain. Comme l’énonçait le rapport historique de l’OMS en 2013, ils proviennent de multiples sources (effluents industriels et municipaux, ruissellement des terres agricoles, gestion des déchets) et exposent l’être humain à des risques sanitaires via de multiples sources (ingestion de nourriture, de poussière ou d’eau, inhalation, contact cutané). Si les effets des perturbateurs endocriniens sur les populations humaine et animale sont avérés, le manque d’informations sur les conditions environnementales dans lesquelles des maladies peuvent se développer reste criant.   

Les micropolluants, ces substances toxiques que l’on peut détecter à très faible concentration (dès le microgramme, voire le nanogramme, par litre) sont pour le moment seulement suspectés d’avoir des effets négatifs sur l’homme (perturbation endocrinienne ou cancérigène). En effet, « le phénomène demeure diffus, complexe : on n’en connaît pas bien les mécanismes », explique Philippe Sébérac, directeur Technique & Performance Eau chez Veolia. « Aujourd’hui », poursuit-il, « les autorités, en France et ailleurs ne rendent pas obligatoire le fait d’intégrer ces molécules dans le contrôle qualité des eaux : des analyses à titre exploratoire sont menées, mais il n’existe pas de critère toxicologique retenu ni de valeur maximum admissible de référence ». Et si, comme l’ont montré des récentes analyses des données publiques, la présence de perturbateurs endocriniens « suspectés » dans les eaux françaises est avérée, on ne parvient pas aujourd’hui à évaluer les risques environnementaux et sanitaires induits par cette présence.

Le phénomène demeure diffus, complexe : on n’en connaît pas bien les mécanismes.

Traitement des micropolluants : un sujet de R&D 

Pour y remédier, l’effort à fournir pour caractériser des micropolluants présents en milieu aquatique reste gigantesque, et devrait nécessiter de plus en plus d’approches complexes dites « multi-barrières », c’est-à-dire agissant à plusieurs niveaux. Il pourrait aussi conduire à changer de paradigme en ce qui concerne les normes de qualité de l’eau : aujourd’hui celles-ci sont liées à la présence - ou à l’absence - d’une substance dans un milieu donné. Demain, ne pourraient-elles pas plutôt opter pour une approche se concentrant sur leurs effets sur les organismes vivants ? 

Les bioessais, qui permettent de caractériser scientifiquement les effets des composés polluants sur les métabolismes, sont ainsi appelés à drastiquement se développer. Mais pour l’heure, le sujet des micropolluants, qui mêle gestion de la qualité de l’eau et protection de l’environnement, et touche de nombreux types de molécules (des détergents aux pesticides, des cosmétiques aux résidus médicamenteux), reste épineux. 

En tant que responsables de la qualité de l’eau, nous nous devons d’être en capacité de la surveiller, et de détecter tous les risques potentiels sur le sujet. La traçabilité, très complexe à mettre en œuvre, met à mal les principes sanitaires classiques selon lesquels la dose fait le poison. Donc, si le sujet est très ancien, il demeure complexe et, au vu de la faible pertinence des méthodes traditionnelles de caractérisation, il faut imaginer les choses de façon différente.
Philippe Sébérac
directeur Technique & Performance Eau chez Veolia

En l’absence de normes réglementaires internationales, la réponse se situe avant tout en matière de R&D : « nous ne sommes pas toxicologues ou microbiologistes, et les études sanitaires ne sont pas dans notre rôle ; tout en suivant l’évolution des recommandations des autorités, nous apportons notre expertise dans plusieurs champs d’expérimentation », ajoute-t-il. C’est en particulier le cas des microplastiques  : si leur traitement nécessite un savoir-faire technologique déjà connu, il en est autrement de leur caractérisation. En d’autres termes, savoir quand, où et comment les traiter est la première priorité, et des expérimentations, en lien avec la demande de plusieurs collectivités, sont lancées sur le sujet.  
 

Traitement des résidus médicamenteux dans les eaux usées : une expérience pionnière

« Imaginer les choses de façon différente » : c’est aussi le cas pour ce qui est du traitement et de l’élimination des résidus de médicaments dans les eaux usées. À Aarhus, ville danoise d’environ 300 000 habitants, une expérimentation a été lancée dès 2014 afin de tracer et traiter ces micropolluants dans les eaux usées du Centre Hospitalier Universitaire de la ville, puis dans la station d’épuration municipale. Il fallait s’assurer que le système épuratoire de l’hôpital pouvait traiter le plus efficacement et le plus écologiquement possible le risque que représente la présence de petites quantités de molécules médicamenteuses (antidépresseurs, anti-inflammatoires, anticancéreux, etc.) dans ses eaux usées. 

Mais ce projet a d’abord permis d’apporter des réponses en termes de caractérisation des eaux usées à traiter. Plutôt celles des hôpitaux ou celles de la ville ? En effet, et notamment car peu de médicaments sont consommés sur place, les eaux usées municipales, et non les eaux usées de l’hôpital, se sont avérées être le lieu de traitement à privilégier : une information primordiale pour les décideurs du projet ! 

Comme le rapporte Philippe Sébérac, ce travail « a aussi permis de tester une technologie de traitement biologique [MBBR, pour Moving Bed Biofilm Reactor], qui utilise des micro-organismes afin de dégrader les matières organiques, et non comme à l’accoutumée de l’ozone ou du charbon. Nous en savons désormais plus à ce sujet ». Jusqu’à 90 % des résidus médicamenteux présents sont éliminables, et ce à l’échelle de la ville : autant dire une solution inédite amenée à se développer. Cette solution, qualifiée de « légère », répond de plus en plus, aux impératifs économiques, une contrainte jugée essentielle au développement des traitements des micropolluants…

À quand un déploiement massif ? 

Jusqu’à 90 % des résidus médicamenteux présents sont éliminables, et ce à l’échelle de la ville : autant dire une solution inédite amenée à se développer.

 

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